vendredi 14 août 2015

[suite] Vikings, la série, les dieux...

Suite à un second visionnage de la série, j'ai souhaité faire un rectificatif de ce que qui avait été énoncé précédemment, toujours à propos de la première saison.

Les runes, que j'avais mentionné pour leur remarquable absence, ont cependant fait deux apparitions furtives. La première concerne plutôt leur nature ésotérique. En effet, le seer (voyant) mentionne les runes comme responsables de l'arrangement du monde, et de la vie des hommes. Chez certains nordiques, les runes étaient vues comme des entités décrivant les étapes du monde, et ce à plusieurs niveaux. Les runes, au nombre de 24 à l'origine (runes germaniques) ont chacune une signification très profonde et énormément sujette à interprétation, mais elles gardent un sens absolu (leur nom), ainsi qu'une signification relative à leur position dans le fuþark. Cette symbolique est traditionnellement rattachée -du général au particulier- à l'histoire de l'Univers (Miðgarðr et les huit autres plans), l'histoire de l'Humanité (dont le début est à rapprocher de la «genèse» des sumériens et religions abrahamiques) et l'histoire de chaque Homme de façon individuelle. Les runes décrivent la naissance, la croissance, l'apogée, le déclin et la mort.

La première rune, Fe(oh), est appelée la richesse. C'est le don de la vie. La dernière rune est Oþal, l'héritage qui est laissé aux générations futures. Comme on aurait pu le deviner en connaissant le rapport des scandinaves à la mort, la dernière rune ne décrit pas LA fin, mais UNE fin.
Le voyant est donc celui qui sait lire dans les runes. Il comprend leur signification propre, leur agencement par rapport aux autres runes, et ce qu'il faut en tirer par rapport à l'expérience personnelle de l'audience. Même si aucune rune ou bâtonnet runique n'est visible, il y a tout à parier que c'est ce dont il est fait usage lors des différentes séances de voyance dont il est question dans la série... (voir article sur la divination).
Second possible usage des runes : la marque présente sur le front de l'«ange de la mort», la rune Maðr en fuþark scandinave récent. C'est une rune dont le dessin a changé pendant la période où la série se déroule (fin VIIIe). À cette époque les scandinaves utilisaient un mélange d'ancien fuþark et de nouveau fuþark scandinave (16 lettres). Maðr a donné Mann puis Man, signifiant Homme. L'ancien dessin était , plus proche du M latin. La rune fait référence à Mannus, l'ancêtre des peuples germaniques, selon l'historien romain Tacite. Maðr est à rapprocher du nom d'une racine couleur sang, qui évoque l'argile, de quoi a été fait le premier Homme selon un poème runique.
Pour en revenir à l'«ange de la mort», c'est là une traduction étrange car la mythologie ne connaît pas d'anges. Les seules créatures susceptibles d'y être associées sont les Valkyries, mais aucun de leur nom ne rappelle l'angelus latin ou l'ángelos grec (messager).


Sans transition, je rajoute une remarque sur les apparitions d'Oðin et de Heimdallr. En effet Oðin est visible lors de la toute première scène de la saison. C'est en fait une vision de Ragnar, qui se réclamera plus tard de lignée divine, une des raisons pour laquelle il est plus enclin à prier Oðin («father», qui est en fait le surnom Allfaðr, père universel) que Thor comme le font ses comparses.
Oðin est représenté à plusieurs reprises comme un vieillard barbu habillé d'un manteau et d'un chapeau sombres, et portant un bâton. C'est la représentation la plus courante d'Oðin dans les poèmes et dans les croyances en général. Oðin aime l'espèce humaine et aime s'y mêler en prenant une apparence volontairement humble. Mais cela ne contredit pas l'hypothèse comme quoi le corbeau serait lui aussi Oðin, qui aurait préféré une apparence encore plus discrète.

Pour ce qui est de Heimdallr, c'est encore là l'exemple d'un dieu aimant apparaître parmi les hommes et c'est également une référence à un poème mythologique en particulier, la Rigsþula. Sous le nom de Rigr, le dieu apparaît une dernière fois à Miðgarðr et se retrouve devant un manoir. Il rencontre ses occupants Faðir et Moðir (Père et Mère), et se fait inviter chez eux. Après un copieux repas ils couchent tous les trois dans le même lit et neuf mois plus tard Moðir accouche d'un garçon qui sera appelé Jarl, le premier Homme de la classe des nobles-guerriers. C'est la troisième partie d'une métaphore de l'organisation sociale à cette époque en Scandinavie (après celle de Thrall, esclave, et de Karl, homme libre).
Cette histoire est quasiment identique à celle racontée par un couple pendant une audience avec Lagertha lors de l'absence de Ragnar. Le mari se plaint que sa femme l'ait trompée avec un inconnu, mais Lagertha lui rappelle l'histoire de Rig, autre nom de Heimdallr et lui demande d'honorer son fils car il est le fruit d'une visite divine, immense privilège...

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